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Hold my hand, again.

(Suite...)

Le couteau crissa en grattant par endroit la noirceur du pain.
Elle serra les mâchoires.

-   Ne pas se crisper.
-   Délicatement, étaler le beurre allégé.

Outremers, une tempête tropicale devenait ouragan.
Elle devina la fureur des vents, la houle haute et verte qui se soulève en force et  se fracasse sur les coraux érigés, le bruit des bateaux aux pontons qui se brisent, la plage longuement ravinée.
   
Lui revient avec dégoût, l'odeur d'après, celle fétide qui longtemps persista dans la case.

Le toast se brisa d'un coup sec.

06:39. 
Beyrouth. 
Heure locale. 
Une jeune femme, originaire du Sri-Lanka, descend d’un bus bariolé. 
A 14:12, un homme impunément lui confisque son passeport. 
Treize semaines et un jour plus tard, elle s'asperge d'essence et se défenestre.

Un collectionneur libanais acquiert aux enchères un nu bleu de Pablo Picasso.
(estimation première: 80.000.000 - quatre-vingts millions - d'euros.)

Un couple d'homosexuels, débarqué en Inde, se jure fidélité dans un ashram.

*    Hold my hand
      The nights are getting darker

Des gens migrent, fuient, quittent tout, ne trouvent rien, s’obstinent, sautent sur des bombes, s’empalent sur des grilles, jettent des pierres, se lamentent devant des murs. Ils se volent, se violent, se maudissent, s'unissent, se trahissent, s’assassinent.
Les femmes se voilent.

Que font-ils ces humains à supplier un crucifié, à brûler des cierges blancs, à exorciser dans des lieux obscurs des nouveaux-nés innocents ? 
Que cherchent-ils en égrenant, devant une grotte aménagée, des chapelets de toutes sortes ?

Que font-ils ces autres, à tomber à genoux, plusieurs fois par jour, en touchant de leur front, la mosaïque incrustée ?
Que ressentent-ils à aiguiser des lames, à psalmodier des paroles, à trancher des cous ?

    Hold my hand
    My heart is full of tears

En Atlanta, une grand-mère fatiguée habille de dentelle une tortue, et la berce.

Debout, entouré d'acier, un trader halluciné rêve d'un Manhattan ressuscité.




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