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Fahrenheit


Le très haut tilleul exhalait, cette nuit-là, son odeur annuelle de floraison. 
Entêtante, douceâtre et parfaitement écœurante. 
Pas une de ses ramures ne frémissait.

Le souffle n’était plus que le sien, court et suffoquant. 
Tout son corps appelait à une brise de mer, venue du Nord, continue et rafraîchissante, qui l'aiderait à vivre mieux, encore un peu.

Lorsque la canicule plombait l'air, et qu'elle appelait ses vieux parents, les mêmes inquiétudes revenaient : vous avez branché les ventilateurs ? Vous pensez à boire de l'eau régulièrement ? Soyez prudents, quand vous enjambez la baignoire ...
C'est compliqué, répondaient-ils. 
Tu viens quand ? 

Elle se demanda, par cette nuit sans personne, maintenant qu'ils étaient morts depuis longtemps, si son corps défaillant et finissant, qui était devenu comme les leurs, finirait par déranger, dès lors qu'il serait inerte, grotesque et pourrissant, l'énigmatique asiatique qui habitait l'appartement d'en face.



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