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L'après 13 et tout le bataclan.


D’air, c’est de cela qu’elle manquait.
De ce souffle léger qui la traversait parfois lorsqu’elle touchait à l’invisible.

L’homme qu’elle connaissait le mieux s'absentait.
Son regard surtout. 
Il se souvenait d’un moment qui le ramenait à l’enfance.
C’était l’été, du jardin assoiffé montait une odeur de cerises éclatées.

Le vide ne se mesure pas, 
ni l’horrifiante rumeur du monde.

L’homme sale et dévasté, allongé à l’entrée du métro, le sait-il ?
Et celui-la, résigné et maigre, à Manille, se crispe-t-il encore devant les suaires pourrissants qu'il fait glisser hors des caveaux étroits ?

Un grand cri lui déchira le ventre.
Trahison, hurla-t-elle ! Trahison ! L’Histoire se moque !

À terre, un genou broyé, la poitrine défoncée, l'ami de tous temps tendait une dernière fois son cou veiné vers les étoiles.


Marilyn Kalish

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