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Désert



Dans l'implacable aridité de l'endroit, le chameau allait l'amble. 
Il humait l'air, sentait l'oasis déposée, plus loin, là-bas, comme un miracle.
Un homme enturbanné le tenait par une longe. 
Des vents brûlants les pénétraient, sculptant des dunes à l'infini.

L'homme marchait. 
Une grande fatigue l'envahissait. 
Par moments, sa vue se brouillait. 
Il titubait au souvenir des nuits glacées, et gardait précise en sa mémoire la brillante Fomalhault, فم الحوت , la magnifique, la très bouleversante constellation du Poisson Austral. 
Il s'égarait dans ses pensées, marmonnait des mots insensés, confondait l'espace et le temps.
Il revoyait sa mère, implorait l'enfant silencieux assis à ses côtés.

La soif le taraudait de boire l'eau du puits.
Il songeait aux dattes sucrées, aux figues mauves, aux femmes voilées qui marchent longues et lentes, de l'argent aux poignets, du henné sur leurs pieds, tatoué.

L'opium, l'absinthe, rien n'était venu à bout du grand vide qui l'habitait.
Alors, lassé de ses dérives, l'envie de s'enfoncer dans le désert lui était venue. 
Il oublierait ainsi son corps déjà maigre et son âme malmenée par les excès de tout.

Debout, encore conscient de sa moelle épinière, il se libérait peu à peu de l'enfer, et l'apaisement tout entier arrivait dans l'épuisement de ses forces.

Au plus fort du Zénith, l'animal tenait haut la tête, la promesse du repos le rendait heureux.
Tranquille, il guidait l'homme vers l'îlot luxuriant.


                                                                               فم الحوت